Pourquoi les stratèges africains parlent peu
LR
« L’arbre qui tombe fait plus de bruit que la forêt qui pousse. » — Proverbe africain
Il y a, en Afrique, des hommes et des femmes qui construisent.
Silencieusement. Loin des projecteurs, loin du bruit.
Ils créent des emplois, influencent les décisions, façonnent des filières entières.
Mais vous ne les verrez pas à la télé.
Vous ne les entendrez pas sur les plateaux.
Ce n’est pas un hasard.
C’est une posture.
Et souvent… une stratégie.
1. Parce qu’ils savent que le bruit ne fait pas la puissance
Il fut un temps, dans un village du Fouta, où l’homme le plus influent n’avait jamais levé la voix. On l’appelait “celui qui parle bas, mais qu’on écoute fort”. Lorsqu’il parlait, les autres se taisaient. Non par peur, mais parce qu’il avait prouvé qu’il savait.
Le véritable stratège africain ne confond pas volume et impact.
Il sait que celui qui parle fort pour exister est souvent vide de substance.
L’histoire du continent est pleine de leaders flamboyants qui ont fini consumés par leurs propres mots.
Pendant que d’autres — discrets, méthodiques — ont posé des fondations solides, loin des slogans.
« Celui qui sait où il va n’a pas besoin de crier. » — Sagesse peule
2. Parce qu’ils ont appris que le pouvoir aime les silences
Le pouvoir réel se déplace dans l’ombre. Il préfère les chuchotements efficaces aux discours décoratifs.
Un vieil industriel sénégalais disait souvent :
“Quand tu commences à faire du bruit, c’est que tu n’as plus le contrôle.”
Regardez les figures comme Yérim Sow, Aliko Dangote, ou la famille Mimran. Peu de mots. Beaucoup de décisions.
Parler, c’est s’exposer. Se taire, c’est négocier en paix.
« Le poisson qui ouvre trop la bouche finit dans la casserole. » — Proverbe wolof
3. Parce qu’ils choisissent leurs batailles… et leurs interlocuteurs
Un bâtisseur ne parle pas à tout le monde. Il ne cherche pas à convaincre la foule, mais à s’adresser aux bons cercles, aux bons moments.
Dans un cercle de vieux agriculteurs en Casamance, un jeune homme se vantait :
“Moi, je parle à tout le monde !”
Un ancien lui répondit :
“Et donc personne ne t’écoute vraiment.”
Les stratèges africains parlent peu, parce qu’ils parlent juste là où il faut.
Le reste du temps, ils observent, ils écoutent, ils notent.
« C’est en écoutant qu’on apprend où parler. » — Sagesse mandingue
4. Parce que dans un continent surexposé, l’invisibilité devient un privilège
Aujourd’hui, l’Afrique est pleine de micros, de forums, de visuels, de selfies avec ministres et panels sponsorisés.
Mais la vraie puissance est ailleurs.
Elle se construit dans l’invisibilité volontaire.
Parce qu’on sait que ce qui est visible est souvent manipulable, attaquable, consommable.
Le silence devient une forme de souveraineté.
« Le lion ne rugit pas chaque fois qu’il chasse. » — Proverbe massaï
5. Parce qu’ils préparent autre chose
Ceux qui parlent peu préparent beaucoup.
Ils anticipent. Ils tracent des routes que personne ne voit encore.
Un homme d’affaires guinéen disait :
“Pendant qu’ils faisaient leurs conférences, j’achetais les terres autour de la mine.”
Aujourd’hui, ils l’appellent pour négocier.
Parler peu, c’est souvent le signe qu’on est déjà ailleurs.
Dans une autre logique. Un autre timing.
« Quand tu vois l’oiseau voler bas, il est peut-être en train de repérer où il va pondre. » — Proverbe sérère
🔚 Conclusion : Le silence, une discipline, un luxe, une force
Parler peu n’est pas un défaut. C’est une forme de rigueur. Une élégance.
Une manière d’être en avance sur son époque.
C’est aussi une manière de se protéger.
De choisir le moment où la parole est utile. Et où elle devient acte.
Au Cercle des Almadies, nous croyons à ce silence fertile.
À cette parole rare, qui vient après l’observation, l’analyse, la construction.
Nous croyons que ceux qui parlent peu sont ceux qu’il faut écouter longtemps.